Cet article est écrit par Alexia Lamazère, formatrice à l’IFMAN (Institut de Formations et de recherche du Mouvement pour une Alternative Non-violente)
Connaissez-vous l’ascenseur émotionnel ? C’est peut-être ce que vous vivez pendant ce confinement. Au cours de la journée, vous pouvez passer, de manière rapide, d’une émotion agréable à une autre qui l’est moins. Vous pouvez ressentir des cocktails d’émotions remplis de sérénité, de tristesse, de gratitude, de peur, ou de colère. Vous pouvez alterner des moments de grande motivation, d’énergie rayonnante et d’autres où l’envie est restée au fond des chaussettes !
Ces ressentis sont tout naturels. Chaque jour, nous vivons tout un lot d’émotions différentes. En cette période tout à fait nouvelle, que tout cela soit exacerbé !
Les émotions sont de fabuleux indicateurs de notre état intérieur et nous poussent à agir d’un certain sens. Elles nous informent de ce qui est important pour nous, de ce dont nous avons besoin pour nous sentir le mieux possible, de ce qui est frustré en nous, de nos manques.
Le terme émotion vient du latin ex-movere qui signifie « sortir de l’intérieur pour aller vers l’extérieur ». En effet, face à un événement vécu, des réactions physiologiques s’enchainent et entraînent des manifestations corporelles : le cœur se serre, des « papillons » ou la boule au ventre, la nuque se crispe, des sensations de chaleur apparaissent, etc.
Nos émotions sont biologiques. Elles sont donc légitimes ! J’ai le droit pendant cette période d’être inquiet-e voire angoissé-e, d’être agacé-e ou peut-être exaspéré-e, et tout aussi dans le plaisir et l’enthousiasme ! Exit les jugements sur ce que je ressens ou sur ce que ressent ma voisine !
Nos émotions sont aussi contagieuses. Avez-vous remarqué que si vous êtes gagné-e par l’agacement ou l’énervement, très vite les personnes autour de vous peuvent à leur tour se retrouver dans ce même état et l’ambiance à la maison change en un rien de temps !
Ce que nos émotions détestent c’est que l’on fasse comme si elles n’existaient pas. La tête dit : « Oui, oui je vais bien, tout va bien ! » mais mon cœur sait pertinemment que je suis dans la tourmente ! Il ne s’agit pas de nier ce qui se passe à l’intérieur de soi mais plutôt d’en prendre conscience car chacune des émotions ressenties a « une utilité ». La peur me permet de me mettre en situation de vigilance par rapport au danger. La tristesse, l’émotion du deuil, me prépare pour passer d’une étape à une autre. La colère s’inscrit comme l’énergie du « stop » et m’incite à poser mes limites. La joie m’entraîne à aller vers l’autre et à partager.
Car, nier nos émotions, c’est prendre le risque de les laisser nous dominer à notre insu. C’est ce moment où je me mets à crier sur mon enfant pour un jeu mal rangé alors que des jouets dans le salon (surtout en ce moment !), il y en a beaucoup et tous les jours ! Le plus souvent, d’ailleurs, cela ne me fait rien de les y trouver ! Mais aujourd’hui, la collection de mes contrariétés et de mes préoccupations est telle, que j’ai besoin d’évacuer ces tensions. Et ce sont mes enfants ou mon conjoint qui subissent !
Beaucoup d’adultes ont été éloignés de ces signaux et donc de ces informations lorsqu’ils étaient plus jeunes. Souvenez-vous des situations où lorsque vous tombiez et pleuriez, vous pouviez entendre « Mais non, tu n’as pas mal ! C’est rien ! » ; lorsque vous disiez que vous aviez très chaud et que l’on vous ordonnait de porter « ce pull car il fait froid »; lorsque vous disiez que vous étiez triste de cette dispute avec votre ami et que vous entendiez « ce n’est pas très grave car il y a plein d’autres copains autour de toi », etc. Au final, cette interprétation posée par les parents, les éducateurs, déconnecte l’enfant de ses perceptions personnelles. Devenu adulte, toujours éloigné de son vécu intérieur, il peut être intéressant de réapprendre « la grammaire des émotions » comme le dit la psychologue Isabelle Filliozat.
Pour être attentif à ce qui se passe en soi, pour connecter avec nos émotions et pour créer un espace pour relâcher ces crispations, voici le STOP – FEEL – GO, un exercice proposé par Jeanne Siaud-Facchin dans Tout est là, juste là. Il permet de mettre en place une routine simple et rapide pour toute la famille.
Le matin, vous programmez une musique douce, une sonnerie, connue par tous. Elle retentira à différents moments de la journée.
STOP : dès que j’entends cette musique, je m’arrête et je reste en silence, pendant une minute.
FEEL (ressentir) : je ferme les yeux et je regarde quelles sont les parties de mon corps qui sont détendues, celles qui sont crispées, celles qui ont envie de bouger. Est-ce que j’ai chaud ou froid ? Après avoir réalisé ce scan intérieur, quelles sont les émotions que je perçois ?
GO : quand la minute est terminée, je reprends mon activité.
Accueillir, ressentir ses émotions c’est prendre soin de soi. Alors foncez ! Prenez soin de vous c’est la meilleure entrée pour prendre soin des autres !
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